Sortir de son quartier: la part de rêve! (4ème partie)

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By adubuquoy@image7.fr mai 10, 2025

Pour des “tables de collège(s)

Une inspiration complémentaire nous est donnée par les tables de quartier (nées à Montréal pour faire reculer la pauvreté et aujourd’hui expérimentées en France suite au rapport Bacqué-Mechmache).

Ces tables de concertation mettent en relation les différents acteurs d’un quartier pour élaborer des solutions qui œuvrent à l’amélioration des conditions de vie de la population dans une perspective de justice sociale et de prise en main par les citoyens de l’avenir de leur quartier.

Pourquoi ne pas organiser alors sur ce modèle, des “tables de collège(s)” dans les QPV?

La légitimité d’une “table de collège” en paraphrasant les objectifs des tables de quartier reposerait notamment sur :

  • sa capacité à mobiliser un grand nombre d’élèves sur les sujets qui les concernent et à animer les actions de manière à ce qu’ils en soient les premiers acteurs et décideurs ;
  • sa représentativité des élèves du collège intégrant ainsi les classes Segpa et les classes dites “périphériques”.
  • la mobilisation de tous les acteurs du quartier dans leur diversité, sans sélection ni refus ;
  • la crédibilité des propositions et actions qu’elle construit : il s’agit à la fois d’être ambitieux et réaliste;
  • sa capacité à être force de proposition (et à ne pas s’enfermer dans la contestation) ;
  • sa capacité à mobiliser l’ensemble de la communauté éducative;

Une table organise les relations de pouvoir, elle définit les rôles de chacun, les objectifs et principes partagés. La table doit s’appuyer sur des élèves «leaders» qui ont une forte capacité de mobilisation, mais veille à la représentation de tous les élèves du collège (classes Segpa, classes “périphériques”) et à renouveler régulièrement ses porte-paroles et représentants. Son fonctionnement assure donc un partage effectif du pouvoir et non sa monopolisation par un petit groupe. Une démarche participative ne vise pas l’unanimisme. Pour Fung et Wright, les processus délibératifs peuvent être décrits quand les conditions suivantes sont réunies : les participants s’écoutent les uns les autres et produisent des choix collectifs tenant compte des avis des uns et des autres.

La réussite d’une table de collège (ou de collèges au pluriel en mettant en avant une logique inclusive à l’échelle d’un quartier ou d’une ville qui intègrerait différents collèges dans une même table) passe comme le soulignent Thomas Kirszbaum et Clément Lacouette-Fougère par sa capacité à mener des actions de manière autonome, à s’auto-organiser au sein du collège, créer des liens avec la direction et les enseignants, nouer des relations de solidarité et d’action collective dans le quartier.

Comment faire mûrir les propositions qui naissent de ces tables de collège(s)?

Là encore une inspiration québécoise nous permet de concevoir un dispositif d’”incubateur civique” afin de “prototyper et faire mûrir des idées de projets à impact social et environnemental” imaginés par les collégien-es.

La diversité des projets “passés” par cet incubateur constitue un modèle à suivre: Favoriser la transition socio-écologique à l’échelle des quartiers grâce au réseau existant des bibliothèques pour mieux transmettre les savoirs; démocratiser l’usage du vélo dans le quartier pour apporter mobilité et autonomie aux populations défavorisées; développer des jardins pédagogiques publics pour sauvegarder la biodiversité végétale en milieu urbain; briser l’isolement des personnes vivant avec un handicap au sein du collège et en dehors et les visibiliser dans l’espace public; utiliser le cinéma comme vecteur d’apprentissage sur soi, sa santé mentale et ses représentations, favoriser la découverte des identités multiples de la ville en valorisant l’histoire des habitants du quartier…

La mise en place d’un incubateur civique à l’échelle d’un (ou plusieurs) collège doit permettre aux collégien-es de déployer des projets innovants à fort potentiel d’impact sur le quartier et leurs propres vies à l’aide d’apprentissages et d’accompagnements pratiques mobilisant leurs enseignants et des éducateurs choisis au sein d’associations. Une première phase – comprendre – leur donnerait les moyens d’analyser les problèmes auxquels ils font face et en identifier les opportunités d’action. Une seconde phase de design stratégique permettra de concevoir de manière précise des projets, leur impact socio-environnemental en utilisant, notamment, les données issues d’une recherche terrain qui pourra s’inspirer d’une autre innovation canadienne reprise en France: les marches exploratoires. Une troisième étape cherchera à déployer ces projets en définissant pour chacun d’eux les grandes phases de déploiement et en contactant les partenaires potentiels. Une dernière phase de consolidation fera retour sur les jeunes en tant qu’acteurs de projet pour leur permettre de mieux faire face aux obstacles qu’ils rencontreront lors de projets futurs.

La part de rêve

Tous ces projets comporteront (heureusement) une part de rêve qui s’avère essentielle pour les mener à bien.

“Chaque collège est unique. Il a ses enjeux particuliers, sa force, une couleur qui lui appartient. C’est un microcosme complexe grouillant de vie. Un collège est à l’image de son quartier, de ses gens, de leur bonheur, de leurs malheurs, de leurs espoirs.

Chaque collège a aussi son lot d’inégalités sociales à résoudre. Plus de la moitié des jeunes de moins de 18 ans des quartiers QPV vivent sous le seuil de pauvreté.

On rêve tous d’aller dans un collège où les jeunes et les enseignants de tous horizons, classes sociales et origines culturelles cohabitent harmonieusement.

Un collège et un quartier qui nous ressemblent et nous rassemblent.

Un collège et un quartier pour lesquels on a envie de s’engager.”

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